Laurence & Alex #1 / 2016

Un tatouage de communion


Laurence, 54 ans

“ Cette transformation, c’est ma vraie reconstruction ”

Laurence était très complexée par sa poitrine amputée, abîmée. A peine sortie du salon de tatouage installé à la Maison Rose, elle en parlait au passé…

“ Ce qui n’était pas beau, Alex l’a transformé en œuvre d’art. Nous avons vécu une expérience de fusion, de partage intense. Ce tableau, ce joli déshabillé sur ma poitrine, c’est notre réalisation à toutes les deux ! Toute en sensibilité, en don de soi et en talent artistique, ma tatoueuse m’a permis d’oser cette transformation. La maladie était présente dans ma lignée familiale mais je refusais de me confronter à cette réalité jusqu'à ce qu’on me découvre deux tumeurs cancéreuses, dont une très volumineuse dans le sein. C’était il y a cinq ans. Je n’ai pas pu échapper à la mastectomie.

Prendre rendez-vous chez un tatoueur ? Impensable !

Les ennuis se sont enchaînés : après l’ablation ont suivi chimio et radiothérapie mais aussi effondrement de la société que je dirigeais, rupture sentimentale, problèmes d’argent. Ensuite, la reconstruction de ma poitrine ne m’a pas satisfaite en termes d’image. Le prothèse derrière le muscle m’a fait un sein plus gros que l’autre, mou, froid, une boule aplatie, carrée. Un dermatologue m’a tatoué le mamelon. Le tatouage artistique, j’y pensais, mais cela signifiait qu’il fallait se déshabiller. C’était déjà difficile devant un médecin et carrément impossible devant Didier mon nouveau compagnon qui se montrait pourtant très bienveillant, alors comment aurais-je pu me dénuder devant un inconnu ?

Bel équilibre physique et psychique

Aujourd’hui, je peux dire que j’en ai vu des tatouages, mais le mien est le plus beau ! La séance a duré 4 heures, j’avais envie que ça déborde, que le motif de fleurs et de dentelle fasse le lien avec l’autre sein. Avant, pendant et après, Alex s’est montrée à l’écoute, adorable, très impliquée. Je me sens différente et le résultat m’a fait pleurer de bonheur. Ma vie de couple peut désormais s’assumer dans la lumière, l’accès au plaisir devient beaucoup plus facile, je suis libérée. Et le plus inespéré, c’est que la différence de grosseur entre mes deux seins a disparu, c’est incroyable ! ”

Alex, 32 ans

“ Je sais que nous resterons en lien ”

Alex est tatoueuse indépendante, son shop se situe à Sanguinet, un joli village du littoral aquitain. Sa rencontre avec Laurence l’a profondément marquée.

“ L’enjeu était plus grand que pour un tatouage esthétique en studio, la responsabilité aussi. Je suis très spécialisée dans le féminin, touchée par le combat des femmes contre la maladie, pour la liberté individuelle, pour la parité. Ma mère est atteinte d’un cancer des os. Mon investissement durant la Semaine Rose Tattoo correspond totalement à un engagement personnel, professionnel, artistique, humain. Pour moi aussi, c’était une première fois et cette expérience restera gravée en moi pour la vie. Que d’émotions ! Des larmes mais aussi énormément de plaisir.

Ça fait du bien de faire du bien !

La rencontre avec Laurence a été exceptionnelle, j’ai tout de suite eu le feeling. Je me suis sentie très inspirée et dès le lendemain de notre premier entretien à la Maison Rose, je lui ai fait un dessin. Elle a découvert son tattoo seulement à la fin de la séance et sa réaction a été ma récompense ! Je sais que je vais suivre l’évolution de Laurence avec son tatouage : j’ai commencé le métier il y a 8 ans et j’exerce en boutique depuis 6 ans mais ce qui s’est passé à Bordeaux pendant la Semaine Rose Tattoo reste inoubliable. Etrangement, au cours du mois d’octobre, « le hasard » a envoyé à mon studio de Sanguinet deux autres femmes qui avaient subi un cancer du sein. Bien évidemment, j’ai aussitôt accepté leur demande !! ”


J’ai osé passer à l’acte et j’en suis fière ! J’aimerais que mon exemple encourage d’autres femmes.

 Ça fait longtemps que je n’ai pas apprécié mon corps. Là, je peux l’admirer. Enfin !


La Semaine Rose Tattoo m’a permis de ne pas me sentir seule dans cette expérience vitale.

J’admire la force de la démarche de ces femmes qui ont lutté et qui continuent à se battre en se réappropriant leur corps.