Ariane, 46 ans

Tatouée par Alex Labeguerie / La Dame gantée

Dès la fin de la séance, j’ai été ravie du résultat. Je me promenais torse nu partout où je pouvais. Je ne me sens plus toute nue, j’ai l’impression d’être complète. Pour moi, c’est ma reconstruction.

 

J’ai eu deux cancers du sein. Pour le premier, j’avais 37 ans quand j’ai découvert une boule dans le sein droit. Je suis allée voir mon médecin, qui m’a fait faire une échographie, puis tout s’est enchaîné très rapidement. Quinze jours plus tard, on me diagnostiquait un cancer triple négatif. J’ai fait de la chimiothérapie pour réduire la tumeur, afin de conserver le sein. La tumeur ayant suffisamment diminué, lors de mon opération, les chirurgiens ont pu me laisser mon sein. J’avais une assez grosse poitrine, ils ont donc pu le remodeler assez facilement, les effets de la chirurgie ne se voyaient presque pas.

 

Étant donné qu’il s’agissait d’un triple négatif, les oncologues ont cherché à savoir si j’étais porteuse de l’un des deux gènes prédisposant au cancer du sein. Ils ont découvert que j’avais la mutation génétique BRCA1. J’ai commencé à réfléchir, à me demander si je ne devais pas me faire une double mastectomie en prévention d’une récidive. J’avais un suivi annuel par IRM. À 40 ans, on m’a fait une ablation des ovaires pour minimiser les risques de récidive.

 

Trois ans plus tard, lors d’un contrôle annuel, on m’a diagnostiqué un cancer sur le sein gauche. La mastectomie a été immédiate. Je voulais qu’on m’enlève le sein droit au même moment, mais ma chirurgienne a refusé : si la cicatrisation s’avérait difficile, cela risquait de retarder les traitements. Elle a eu raison, l’opération et le contre-coups des rayons ont été compliqués, et je suis toujours gonflée du côté droit aujourd’hui.

 

Parallèlement, j’ai vu des chirurgiens et psychologues qui m’ont montré des images de reconstruction qui ne m’ont pas vraiment convaincue. Je ne voulais plus souffrir, subir plusieurs opérations pour obtenir un rendu qui ne serait pas joli, qui ne me correspondrait pas. Je ne me sentais pas à l’aise à l’idée de mettre des prothèses - ni une perruque, d’ailleurs. Ce n’était pas moi. J’ai tout de suite commencé à réfléchir à un éventuel tatouage. J’étais déjà tatouée et j’avais déjà vu des images sur internet, puis on m’a parlé de l’association Sœurs d'Encre.

 

J’ai pris contact avec Alex, qui a énormément de demandes, et j’ai été très heureuse que mon projet soit retenu ! Dès la fin de la séance, j’ai été ravie du résultat. Je me promenais torse nu partout où je pouvais. Je ne me sens plus toute nue, j’ai l’impression d’être complète. Pour moi, c’est ma reconstruction. Avant, j’avais tendance à me recroqueviller. Aujourd’hui, je me sens libérée, j’ai plus confiance en moi. Je m’achète des robes avec des petites bretelles, je me fais plaisir. Les chirurgiens à qui je montre mon tatouage sont impressionnés, le voient comme une alternative à la chirurgie réparatrice.


Retranscription du témoignage par Mélissa Castillon.